En ce moment, chaque fan de catch est focalisé soit sur ce que nous réserve le nouveau “Brand Split” du main-roster de la WWE, soit sur les précisions et les ramifications de la suspension de celui qui était jusque là l’élu obligatoire, Roman Reigns. Certes, certains restent intéressés par le Cruiserweight Classic en production, l’avenir de Finn Balor à NXT (surtout avec l’abandon de la marque “Balor Club”) ou même les dernières révélations intéressantes de Batista. A tel point qu’on en oublie certains détails, dont la valeur – grande, jadis – s’amenuise de jour en jour : qui, devant le dernier épisode de WWE Monday Night RAW, a frémi ou s’est réjoui de revoir le champion Inter-Continental à l’écran ? En effet, après plusieurs semaines de tournage de The Marine 5 des WWE Studios, The Miz est revenu pour se faire humilié face à un vieillissant et inintéressant Kane. Plus d’un mois qu’il avait disparu des écrans et des rings, sa ceinture blanche et dorée à l’épaule, sans prévenir. Et qui s’en est soucié ? Pas grand monde, en vérité.
Le deuxième champion le plus important de la compagnie (en terme de hiérarchie du main-roster, de prestige historique et de temps d’antenne), absent pendant plus d’un mois, et il n’a même pas à se justifier d’une soit disante “règle des 30 jours” (une tradition “kayfabe”, justifiant d’un titre rendu vacant lorsqu’un champion est blessé ou … suspendu) ? C’est dire ce qu’en pensent les instances créatives et exécutives de ce titre et rôle de champion intermédiaire #1. Celui-là même que portait les futurs grands champions et sacro-saints “visages” de la compagnie il n’y a encore pas si longtemps … Rétrospective sur l’importance et la valeur d’un titre déchu.
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La noblesse du titre, la force oubliée du championnat Inter-Continental
En 1979, Vincent Kennedy McMahon et sa femme, Linda, fondait Titan Sports Inc. et rachetait à Vince McMahon Sr. sa World Wide Wrestling Federation dans la foulée. En juin de la même année, un titre servant de second prix, juste en-dessous de celui de champion du monde poids-lourd, était crée : bourreau de Ted DiBiase Sr., le nouveau champion nord-américain, Pat Patterson, devenait l’inaugural champion Inter-Continental en devenant le “champion sud-américain” suite à un tournoi fictif à Rio de Janeiro. Le prestige, bien que totalement illégitime, qui allait faire la réputation d’une telle distinction était ainsi d’ores et déjà établi. Rare titre de champion à rester intact même au travers des premières années de cette nouvelle World Wrestling Federation (qui verra passer une dizaine d’autres, dont l’Inter-Continental Tag Team Championship, dont quelques-uns repris à l’internationale, notamment à la NJPW), il remplit à merveille le précédent rôle du WWWF United States Championship (une pale copie du NWA United States Championship, ancêtre de l’actuel WWE United States Championship) jusqu’à la deuxième moitié des années 1980s, où sa valeur rivalise sérieusement celle du championnat du monde. C’est bien simple, sur la planète catch, aucun titre n’est plus prestigieux que les titres mondiaux de la WWF, de la NWA ou ce titre Inter-Continental.
Porté par ‘Macho Man’ Randy Savage, The Ultimate Warrior ou encore Bret ‘The Hitman’ Hart à la fin des années 1980s et début des années 1990s, il est d’une importance inégalée. En tant qu’enjeu des Main-Events de la moitié des “house shows” – l’autre, étant la ceinture le plus souvent détenue par Hulk Hogan – il sert de plaque d’identification au catcheur qui le détient, devant prouver chaque soir si il mérite le “push” qui lui est ainsi donné et le prochain “méga-push” qui pourrait faire de lui le champion du monde incontesté de la compagnie. Autrement dit, soit son nouveau grand antagoniste (face à ce cher ‘Hulkster’), soit son nouveau “visage” pour les prochaines années à venir. A la signification claire pour les catcheurs qui le convoitent, le championnat Inter-Continental incarne alors une valeur d’autant plus importante pour les fans : la garantie d’assister au meilleur match sur la carte, car vecteur d’un effort redoublé pour les lutteurs y concourant. “Le titre Inter-Continental, c’est le titre que chacun doit convoiter […] C’est celui des bosseurs, qui sont préparés à l’étape supérieure – le championnat du monde” avait déclaré ‘Stone Cold’ Steve Austin en se rappelant son aspiration à devenir champion en 1997. En d’autres termes, aussi fictif soit-il dans le cadre de cet univers “kayfabe” dont il n’est qu’un enjeu sportif et compétitif de plus, sa valeur, son importance et son prestige sont bien réelles et rendent déterminant son rôle, au sein d’une hiérarchie de talents. Et pourtant …
D’étape intermédiaire à accomplissement mineur ou la dévaluation progressive d’un grand prestige
… au cours des années 1990s jusqu’au début des années 2000s, tout semble s’estomper. En plein cœur des Monday Night Wars, la WWF envoie des idées dans tous les sens. Une nouvelle fois, myriades de titres sont créés pour être abandonnés quelques années plus tard. Le titre Inter-Continental, quant à lui, demeure et sa signification résiste grâce à quelques champions vraiment à la hauteur : The Rock, Triple H, Chris Jericho ou encore Rob Van Dam (l’unifiant avec l’Hardcore Championship et l’European Championship, en 2002). Malgré tout, suite au choix de Triple H de faire du nouveau World Heavyweight Championship (se basant sur l’héritage du WCW World Heavyweight Championship) l’unique prix solo du roster de RAW post-“Brand Split”, il est désactivé pendant 9 mois. Quand il revient à la vie, la perte d’intérêt de ses gérants créatifs reprend : hormis certains noms comme Randy Orton, Jeff Hardy ou même Dolph Ziggler et Cody Rhodes (à l’origine du rappel à la ceinture blanche classique), le titre Inter-Continental ne cesse d’être sérieusement délaissé.
Puis, à la fin de la première version du “Brand Split” en 2011-2012, il se voit voler la vedette par cette même “Big Gold Belt”, qui lui avait piqué la place 10 ans auparavant. Toute la structure compétitive du main-roster, et pas pour le mieux. Avec le championnat de la WWE restant le titre suprême à sa tête, la compagnie garde pourtant les titre mondial, Inter-Continental et US en activité – les plaçant dans cet ordre de prestige, sans bien le définir à l’écran. Autrefois l’égal du titre de champion de la WWE – donc réservé au plus éminent catcheur de la promotion – le championnat mondial en est ainsi réduit au stade de réussite intermédiaire, quoique plus souvent de second prix – perdant son image prestigieuse justifiant une telle dénomination qui reste la sienne. Le titre Inter-Continental, à son tour, n’est plus qu’un accomplissement mineur sans réelle valeur, autant pour les catcheurs que pour les fans (un phénomène qu’a su éviter jusque là la NJPW qui, depuis la création de son propre titre Inter-Continental IWGP lors d’une tournée bien réelle aux États-Unis en 2011, n’a cessé de le présenter soit comme un égal du titre mondial soit comme son deuxième trophée le plus valorisant). Néanmoins, avec la réunification des titres mondiaux à l’aube de l’année 2014, de petites germes d’espoir apparaissent. Après l’essai Daniel Bryan malencontreusement interrompu (en parallèle à celui, réussi, voyant John Cena comme “revitaliseur” du titre de champion US), les règnes de Dean Ambrose et Kevin Owens se font sur la bonne voie : enfin, le titre Inter-Continental est donné à des “bosseurs” et potentiels “futurs champions du monde”. Une apparente bonne lancée, poursuivie un temps par le règne actuel de The Miz, qui s’est brusquement arrêtée aujourd’hui.
Alors que l’antique et prestigieux championnat Inter-Continental semble vivre ses heures les plus sombres, que penser de la nouvelle renaissance escomptée d’un deuxième titre de champion du monde poids-lourd, prochain équivalent à celui détenu par Dean Ambrose pour structurer la version 2.0 du “Brand Split” de cette “nouvelle ère” ? Une formule où “on prend les mêmes et on recommence” et qui n’a jamais vraiment porté ses fruits, même auparavant. Et, qui plus est, un cas problématique précis qui en dit long sur la situation générale de la WWE : au lieu de maintenir et conforter les acquis, et de redoubler d’efforts pour y arriver, elle préfère créer, consommer puis abandonner dans l’espoir court-terme qu’avant cela, la création du jour “marche”. Tout comme le dégueulis ignoré, fourni en commentaires, les grandes formes, esbroufes et artifices de la WWE sont l’arbre enguirlandé qui cache une forêt de problèmes et cas désespérés … En espérant que ce titre Inter-Continental ne s’en retrouve pas définitivement à ce stade.